Alberto Zapatera, professeur au CEU d’Elche, revendique l’early algebra, ou algèbre précoce, afin d’introduire la pensée algébrique avant le collège

Alberto Zapatera, chercheur au CEU et expert en algèbre.

L’algèbre nous aide à résoudre des problèmes et situations de la vie quotidienne dans des contextes personnels, professionnels, sociaux, etc., « et requiert un certain niveau de compréhension des mathématiques, de raisonnement mathématique et d’utilisation d’outils mathématiques ». C’est ce que pense Alberto Zapatera, professeur et chercheur en pensée mathématique, qui revendique l’apprentissage de l’algèbre dès la primaire, et non seulement au collège. L’algèbre aide les étudiants à envisager des relations entre les quantités, à modéliser, établir des prédictions, généraliser, justifier, communiquer, articuler des idées, etc.

Pourquoi est-il si important de développer la pensée algébrique des élèves de primaire ?

Parce que l’enseignement actuel des mathématiques en primaire provoque par la suite des difficultés dans l’enseignement de l’algèbre au collège, et ces difficultés entraînent un rejet de l’algèbre qui, trop souvent, s’étend aux mathématiques dans leur ensemble. On aborde généralement l’algèbre pendant les premières années du collège. On considère que les élèves de primaire ne sont pas prêts à passer de la pensée concrète à la pensée abstraite. Cependant, de nombreux chercheurs, dont je fais partie, ont observé que les élèves de primaire ont des capacités naturelles de raisonnement qui permettent de développer la pensée algébrique. La pensée algébrique est donc implicite chez eux.

Plusieurs courants sont nés de ces observations, en particulier celui d’early algebra ou algèbre précoce, qui recommande de commencer à aborder l’algèbre dès l’école primaire, voire en maternelle. Le but est de faciliter l’apprentissage de l’algèbre et, essentiellement, de promouvoir une façon de pensée et d’agir avec les objets, les relations et les structures mathématiques, en vue d’un enseignement plus exhaustif.

Plusieurs approches sont proposées pour introduire l’algèbre et la pensée algébrique à l’école primaire. L’arithmétique généralisée, les relations, les fonctions, les équations, les généralisations, le langage algébrique, les transformations, la modélisation, la résolution de problèmes, etc.

Nous nous trouvons actuellement au cœur d’un processus de recherche très intéressant sur les différentes manières d’introduire la pensée algébrique dès les premières années de scolarisation. Il n’y a pas d’approche unique, mais il existe un consensus général sur le fait que l’algèbre en primaire doit aller au-delà du symbolisme algébrique des chiffres et des lettres. Cette approche doit se concentrer sur l’organisation d’activités impliquant activement les élèves dans des processus mathématiques où la pensée algébrique peut apparaître et être comprise.

Les futurs professeurs doivent être formés en pensée algébrique.

Apprentissage de l’algèbre dès la primaire

Qu’en pensez-vous ?

Toutes ces approches sont valides et peuvent aider à inclure l’apprentissage de l’algèbre dès l’école primaire. Mes recherches se concentrent sur deux approches liées l’une à l’autre : la généralisation de patrons et la pensée fonctionnelle. Pour de nombreux chercheurs, la généralisation est l’essence de l’algèbre et le moyen le plus efficace d’y initier les enfants. Généraliser consiste à passer du particulier au général, et à voir le général dans le particulier. En ce qui concerne la généralisation de patrons, elle consiste à observer une propriété commune à plusieurs termes d’une séquence et à étendre cette propriété à l’ensemble des termes de ladite séquence. L’approche fonctionnelle se rapporte quant à elle au développement de situations de la vie réelle dans lesquelles les relations quantitatives peuvent s’expliquer à l’aide de fonctions. Ainsi, la pensée fonctionnelle est centrée sur la construction, la description, le raisonnement et la représentation entre des quantités qui covarient.

Que signifie penser mathématiquement, comme l’assure Vergel, et qu’est-ce que cela apporte à l’étudiant ?

D’après Mason, Burton et Stacey, penser mathématiquement implique de concevoir les mathématiques davantage comme un processus, que comme un produit. Plus comme un ensemble d’idées que comme des résultats exacts. Leur objectif est de montrer comment aborder chaque problème, autrement dit, comment l’affronter d’une manière efficace, en apprenant de l’expérience. En d’autres termes, penser mathématiquement revient à appliquer la connaissance mathématique pour comprendre les relations existant dans l’environnement, les quantifier, raisonner sur elles, les représenter et les communiquer.

De cette manière, un étudiant pense mathématiquement s’il est capable d’appliquer les mathématiques à son environnement et d’utiliser ses connaissances mathématiques comme un outil pour décrire le monde et y évoluer efficacement. En d’autres termes, l’élève pense mathématiquement s’il reconnaît les applications des mathématiques dans divers domaines et les utilise pour comprendre des situations et résoudre des problèmes.

Et le professeur ?

Cette nouvelle conception des mathématiques représente un défi pour les enseignants et leurs formateurs, qui doivent réenvisager ce qu’est l’enseignement. Nous devons développer chez nos élèves des capacités générant une pensée mathématique qui leur permet de faire face à des situations quotidiennes et de résoudre des problèmes.

Ne plus avoir peur des mathématiques

Comment parvenir à ce que les élèves, indépendamment de leur étape éducative, n’aient plus « peur » des mathématiques ?

Je crois que la peur des mathématiques est fortement liée à la peur de l’échec. Cette peur de l’échec produit chez l’élève un manque de confiance, une faible estime de soi et des blocages interprétés comme des limitations, ce qui débouche trop souvent sur un rejet des mathématiques. L’échec nous ramène de nouveau aux manques dont nous parlions plus tôt. Ainsi, afin que les élèves n’aient plus peur des mathématiques, nous devons surmonter les déficiences de l’enseignement-apprentissage des mathématiques.

Alors, que faire ?

Nous devons procéder à une rénovation méthodologique dans laquelle, à l’aide des méthodologies actives, les élèves seront au centre de leur apprentissage et construiront leurs propres connaissances. Nous devons adapter le programme aux besoins des élèves et à la situation actuelle, et par-dessus tout, nous devons offrir aux enseignants, qui doivent être les véritables artisans du changement, des programmes de formation et de perfectionnement. Ce sont eux qui mettront en pratique les nouvelles méthodologies. Ils pourront en outre concevoir des tâches et activités proches des élèves, qui les motivent, qui abordent les mathématiques d’une manière agréable et amusante, qui éveillent leur intérêt et leur transmettent finalement un amour et une passion pour les mathématiques.

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